27 Juin 2016
Edit : Internet est revenu ! Donc voici l'article remanié.
Un énorme merci (encore) aux Editions Slalom pour ce service presse.
Edition: Slalom
Date de publication : 9 juin 2016
Format : Roman jeunesse (environ 80 pages)
Genre : jeunesse, tranche de vie
L'auteur : Sophie Adriansen
Résumé : Marion, collégienne en pleine croissance, est obsédée par la longueur de ses jambes qui n'en finissent pas de s'allonger, rendant la recherche d'un jean qui lui aille bien extrêmement délicate. A l'âge des complexes, des premiers émois amoureux et de la construction de l'image de soi, être hors cadre se révèle parfois difficile, voire douloureux. Comment attirer les regards de Grégory, dont elle est amoureuse, avec un pantalon qui lui découvre les chevilles ?
Mais alors que le collège part en voyage scolaire à Amsterdam, Marion profite de cette occasion pour élargir son horizon. Elle approfondit sa passion pour l'art, notamment en découvrant in situ le célèbre tableau La Ronde de nuit, et met en perspectives ces contrariétés d'adolescente née après l'an 2000 en visitant la maison d'Anne Franck.
Mon avis : Les grandes jambes raconte l'histoire de Marion, une jeune collégienne vraiment très grande, pour son âge. S'en suivent des problèmes de la vie quotidienne, parfaitement ancrés dans l'univers de l'adolescence. L'histoire s'ouvre sur la recherche d'un jean à la taille de l'héroïne, tâche qui s'avère complexe puisque ses jambes sont démesurées tandis que les jambes des pantalons, elles, sont ridiculement petites. Le point de vue interne du narrateur – c'est Marion qui raconte – permet de saisir toute l'ampleur du problème. Nul besoin d'un diplôme de psychologie pour savoir qu'à l'adolescence, le regard des autres peut être destructeur. C'est ce regard qui forge Marion et la force à faire autant d'efforts.
Ce roman a tout pour plaire. Il prend place dans l'univers de son lectorat – des adolescents de 12-13 ans – et aborde des sujets quotidiens. Il n'y a pas vraiment de gravité dans l'histoire. Les préoccupations de Marion sont totalement normale pour une fille de cet âge. Ses pantalons trop courts, ses chaussettes visibles, son béguin pour le beau Grégory à qui elle n'a jamais vraiment parlé, sa honte lorsqu'elle commet une maladresse à la cantine, … Tout parle aux jeunes lecteurs, mais aussi à nombre de lecteurs adultes. En effet, il me semble que nous avons tous eu ce genre de soucis. Pour certains, c'était un problème de jambes, pour d'autres une histoire de seins, pour d'autres encore une question de moustache, de cheveux, ou même de poids. C'est une plongée dans l'univers cruel de l'adolescence que nous offre Sophie Adriansen.
Mais tout n'est pas une question de physique, contrairement à ce que l'on pourrait croire. Ou d'amour, d'ailleurs. L'histoire parle également d'art et d'histoire, mettant ces deux domaines au service de l'acceptation de soi. En effet, la classe de Marion se retrouve à travailler sur un projet mêlant ces deux matières. Grâce à ce projet, l'héroïne va se découvrir une passion pour un peintre de l'époque flamande : Rembrandt. Elle apprend des tas de choses sur le tableau « La Ronde de nuit », et je les ai apprises avec elle. J'avoue avoir été curieuse et avoir vérifié l'exactitude des anecdotes données par l'auteur. Comme je le pensais, elles étaient justes. Je n'ai pas de grandes connaissances en matière de peinture, mais les descriptions du tableau m'ont permis de me faire une idée très approchante du véritable tableau de Rembrandt. J'ai été surprise d'avoir aussi bien visualisé le tableau sans jamais l'avoir vu. C'est un excellent point ! Le passage où Marion voit enfin ce tableau est probablement mon passage préféré. Il est d'une justesse et d'une poésie fines. J'avais la sensation d'être à sa place, dans cette bulle.
Du côté historique, c'est une découverte du lieu de vie d'Anne Franck qui a su donner une véritable profondeur au texte. On sent que l'auteur connait son sujet et on devine aisément qu'elle a déjà visité
ce musée. Elle a parfaitement su retranscrire l'ambiance qui règne dans ce type d'endroit, lourde et pesante. J'ai particulièrement apprécié la réaction de l'héroïne et le recul qu'elle a pris sur ses « petits » problèmes – après tout, qu'est-ce qu'un pantalon trop court face à la douleur de la vie d'Anne Franck ?
Le style de l'auteur est très appréciable. Sophie Adriansen possède une plume fluide et sait se placer du point de vue de son héroïne. A la fin de l'ouvrage, on apprend que l'auteur a vécu beaucoup des aventures de Marion. Cela a contribué au réalisme du texte. Pour autant, je trouve vraiment génial d'avoir eu la sensation de me retrouver adolescente. Je pense que le public visé saura également se reconnaître dans cette héroïne. Marion n'a rien de ces personnages caricaturaux qu'on rencontre fréquemment. Elle a du caractère, se soumet au regard des autres, lutte pour avoir ce qu'elle veut mais capitule lorsqu'il le faut, elle réfléchit avant d'agir mais garde une certaine spontanéité, elle est sensible juste comme il faut, fait toutes ces choses qu'on aimerait faire quand on craque pour quelqu'un. Et surtout, elle se remet en question sans cesse et relativise. C'est un personnage très intéressant.
Verdict : ♥♥♥♥♥ Pas tout à fait un coup de cœur, je pense être un peu grande pour craquer totalement sur ce type de roman, mais presque. Le style est agréable, l'histoire bien menée et l'héroïne très crédible et intéressante. C'est un livre qui parlera aux jeunes adolescent-e-s et leur fera peut-être prendre un peu de recul, dans l'espoir qu'ils s'acceptent enfin !